30 janvier 2007

Mari Chéri se rebelle

Mari Chéri a lu mon blogue hier. Ce matin, il est resté au lit plus longtemps que d’habitude, et en déjeunant, tout bonnement, comme ça, il me dit qu’il a visité le www.ladyw.ca hier. Puis, silence. (Je panique par en dedans et me remémore tous les passages croustillants qui le concernent. Oh non, oh non, oh non.)

LW, nonchalante : «Et…?»

MC, renfrogné: «Et quoi…? Qu’est-ce que tu veux que je te dise? »

LW : «Que c’était drôle?»

MC, exaspéré : «Tu me donnes l’air d’un fainéant macho et dégueu, du genre qui exige son steak-blé d’inde-patates sur la table à 17h15 tous les soirs pis trippe sur le porno! T’exagères! »

(Moi, exagérer? Meuh non. J’ai peut-être une subtile tendance à embellir certains détails pour les besoins narratifs, mais quand même…)

MC, blessé : «C’est juste que je me sens vulnérable, tu peux tellement être méchante… Des fois je me demande si tu m’aimes vraiment…»

LW, qui se sent pas mal cheap : «Bien sûr que je t’aime. Regarde, je vais même te consacrer un message en entier, avec juste des gentillesses… »

MC, encore fru: «J’en veux pas de ton blogue de pitié. Tiens, je vais peut-être commencer mon propre blogue : www.ladyw-est-une-salope.com... On va voir si moi aussi je peux partager des tranches de vie…Comme la fois que tu as rempli ma boîte à lunch de jouets sexuels que j’ai déballés devant tout le monde à la caf du bureau…»

(Je n’ose pas lui faire de la peine en lui disant que l’adresse www.ladyw-est-une-salope.com a déjà été achetée par un consortium de collègues et voisins qui ont déjà souffert de mon sens de l’humour mordant. Ils se rencontrent aussi tous les mercredis soirs dans un sous-sol d'église de St-Hubert.)

LW, inquiète et conciliante : «Minou, je suis prête à n’importe quoi pour que tu me pardonnes… »

MC, soudainement intéressé : «N’importe quoi?»

LW, résolue: «N’importe quoi. »

Voici donc un texte dicté par Mari Chéri que je dois reproduire en intégralité pour continuer à partager le pot de Nutella et le lit conjugal :

Chers lecteurs et lectrices,

Comme vous le savez si bien, j’ai une grande gueule jumelée à une fâcheuse tendance de raconter des niaiseries pour me rendre intéressante. Personne n’a autant souffert de ce trait de personnalité déplorable que mon splendide époux, ExtremeDude (en effet, il semblerait que je me sois trompée de sobriquet et que le nom de Mari Chéri ne lui convienne PAS DU TOUT).

ExtremeDude est un homme brillant, viril et surtout très patient envers l’épouse dévergondée que je suis. Je dois toutefois reconnaître que même la patience divine a ses limites, et qu’il n’est vraiment pas correct de s’amuser aux dépends de ses poils d’oreille, du fait qu’il manque d’énergie le matin ou de la mutilation de ses organes génitaux (a.k.a. sa vasectomie).

Ainsi, je vous demande chers lecteurs d’accepter mes plus sincères excuses pour vous avoir exposés à tant de blagues douteuses à propos d’un être si bon et généreux.

Mes meilleures salutations,

LadyW (qui devrait être bonne pour une partie de fesses ce soir)

27 janvier 2007

Noune Story

(Ok, si vous êtes du genre plate à vous offusquer quand une femme dit les vraies affaires en utilisant les mots (presque) anatomiquement corrects, ceci n’est pas le blogue pour vous aujourd’hui. Trouvez-en un sur le parchési ou la communauté tibétaine de Val d’Or et revenez demain.

Pour les copains des vieux pays, le mot noune réfère aux parties génitales féminines et provient du latin nounus :“fleur délicate et fragrante”. Not.)

Ça a commencé quand Mari Chéri a gentiment accepté de se faire vasectomiser. (Il y a tant de détails amusants dans l’histoire que je garde le tout pour un autre jour.) En échange, il m’a exprimé un désir troublant qui le triturait depuis des années semblait-il : il voulait une noune nue. Vous avez bien lu : pas une nounoune nue, pas une nonne de l’ONU, une NOUNE NUE. Pendant que vous prenez une minute pour imaginer la triste réalité d’une telle demande, laissez-moi vous expliquer le fonctionnement tordu de mon couple.

Après lui avoir donné deux beaux poupons de neuf livres et demie moyennant une trentaine d’heures de travail juteux et enduré de nombreuses années de loto bébé («Non, c’est correct, pas besoin de condom, le timing est bon.» Deux semaines plus tard : «Maudit, je suis en retard de neuf jours, j’ai-tu l’air enceinte?»), Monsieur acquiesce finalement à subir une intervention chirurgicale mineure de huit grosses minutes incluant le chitchat avec la jolie secrétaire médicale. Toutefois, il y a une condition : que je demande à ma fidèle Pierrette l’esthéticienne de poser un acte dénaturé normalement réservé aux stars du porno et qui, en plus, fait SUPER MAL. Yé.

Mais bon. Malgré l’impression que ce blogue donne parfois, j’aime beaucoup Mari Chéri. Il est propre, bien élevé, ne me bat pas et ne me donne pas trop souvent le goût de le battre lui. L’harmonie totale quoi, donc je veux lui faire plaisir. Bravement, résolue, j’arrive chez Pierrette pour mon dépoilage mensuel. D’entrée de jeu, je ne sais pas comment aborder la question délicate :

LW, mal à l’aise : «Toi, Pierrette, fais-tu ça, des fois, ché pas, genre un Brésilien?»

Pierrette, en train d’étendre de la cire chaude sur mes orteils : «Un quoi?»

LW : «T’sé là, comme un bikini extrême? Down there?»

Pierrette, qui ne lève pas les yeux mais vient de comprendre : «Oui, oui. As-tu apporté des photos?»

LW, surprise : «Des photos de quoi?»

Pierrette, très business: «Ben, de nounes que t’aimes, c’t’affaire. Si tu veux que je te fasse un design spécial, il faut que tu me le montres, j’peux pas deviner. »

(Je m’arrête un moment pour penser au concept de designs de nounes. Comme un petit cœur en poil, une vache, un éclair comme sur le front de Harry Potter? Et à part ça, où tu trouves ça, des photos de nounes design? Y a-t’il un catalogue sur l’Internet ou un cours spécial chez Édith Serei? Les possibilités sont infinies, le traumatisme total.)

LW, essayant d’avoir l’air nonchalante : «Non non, je pensais plus comme à pu de poils pentoute.»

Pierrette, hochant la tête: «Ok. Enlèves tes petites culottes.»

LW, un peu effrayée : «Oui, ok, si c’est nécessaire…»

(Je m’exécute, et me retrouves nue comme un ver, un solide ver rose avec des vergetures, étendue sur la petite table en plywood. Pierrette positionne ma main pour que je tienne la peau et recouvre de cire chaude la surface délicate sur la gauche. Puis, elle tire sur la cire durcie.)

LW: «Aaaaaaaaaaaaaaargh. Ayoye! Juste les poils!»

Pierrette, pas impressionnée: «Arrête donc, mes autres clientes vont t’entendre. Ça fait pas si mal que ça. »

(Pendant ce temps, elle a étendu la cire sur l’autre côté et l’arrache de toutes ses forces. Je ne crie même pas tant je suis saisie.)

LW qui s’apprête à brailler: «Je pense que j’ai changé d’idée. Laisse faire.»

Pierrette: «Ben non, regardes : on a fini le devant. C’est super beau! Là, tournes- toi sur le ventre pis écartes tes fes… »

LW horrifiée : «Pour quoi faire… tu vas pas m’épiler LÀ, quand même!»

Pierrette: «Ça fait partie du deal, mais c’est toi qui décides… C’est juste que la noune toute faite pis les jambons poilus, ça va avoir l’air drôle. »

(Mais je suis déjà debout, toute habillée en train de mettre ma tuque et mes mitaines.)

LW pressée de se sauver: «C’est pas grave, on fermera la lumière. Coudon, y’a-tu beaucoup de tes clientes qui se font faire ça? »

Pierrette: «Presque toutes, pis pas juste les filles! »

LW soudainement bien intéressée: «Y’a des gars qui se font faire des complets? »

Pierrette: «Oh oui, c’est très populaire chez les jeunes… »

(Une opportunité se dessine graduellement dans mon esprit… Ma fête s’en vient, et ça va chauffer au Brésil de Mari Chéri…)

26 janvier 2007

Tout le monde en braille

"Madame W, c'est à votre tour… Si j'étais vous, je ferais attention, Guy A. est vraiment d'une humeur massacrante et il vient de faire brailler Roy Dupuis comme un bébé." "Roy Dupuis, vraiment? Qu'est-ce qu'il lui a dit?" "Qu'il avait l'air de patiner sur la bottine dans Maurice Richard et que tout le monde trouvait Nikita super poche mais que la CBC nous payait pour l'écouter." Ouch. Tout d'un coup j'ai bien hâte de retourner chez nous et je me dis que mon début à la télé pourrait bien attendre un millénaire ou deux. Rien ne presse.

Mais manque de pot, la petite assistante goth choisit ce moment pour me pousser de toutes ses forces vers l'entrée du studio. Je me retrouve sous les projecteurs et je resserre instinctivement mon châle de bohémienne de Greenfield Park autour de mes épaules malgré la chaleur. Je me rends compte rapidement que mon choix d'outfit est déplorable. Tout le monde est de cuir noir vêtu. Les filles ont l'air cochonnes mais pas trop et les gars font macho métrosexuel à souhait. Je ressemble à une retraitée dans les affiches du gouvernement provincial pour l'assurance médicaments.

"LadyW…Tiens tiens." Guy A. me lance un regard sadique tout en triturant ses petites cartes diaboliques. Les autres invités évitent mon regard, l'auditoire peut sentir le sang qui s'apprête à couler à flots. Roy a les yeux bouffis et l'air abruti, quoique c'est plutôt naturel chez lui, mais en tout cas… J'ai peur.

"Vous avez dit, et je cite:" J'haïs Tout le monde en parle parce que je trouve que Guy A. Lepage est un parvenu fendant qui a la prestance d'un radis et le sens de l’humour d’un ado désaxé." C'pas très fin ça, n'est-ce pas, mes amis… Madame W devrait être punie, et ça devrait faire mal, très mal…" Je proteste: " Oui, mais là j'étais fâchée parce que vous n'avez même pas ri d'Éternelle quand vous avez interviewé Caroline Néron. Elle était tout le temps toute nue et c'était évident que le film était juste une excuse pour la voir frencher d'autres filles!" "Ce que je choisis de discuter avec la charmante mademoiselle Néron c'est mon affaire, ce qui me préoccupe, c'est votre manque d'objectivisme… J’ai raison d’être fendant, c'est pas de ma faute si j'ai par moi-même profondément transformé la face de l'actualité au Québec depuis 2004… Si j'ai tout seul mis André Boisclair, un bellâtre gai et ex-cocaïnomane, sur la mappe de la politique québécoise grâce à mes questions perspicaces. Ah oui, madame W, c'est évident que c’est vous qui avez un problème, un GROS problème!"

(L'auditoire pendant ce temps s'est levé et brandit maintenant un assortiment de fourches et de couteaux qui semblent avoir été gracieusement distribués par l'équipe de production. Je sens une odeur de brûlé et me rends compte que mon châle est en feu et que l'assistante goth a profité de mon désarroi pour m'enchaîner au tabouret en plastique. Guy A. rit à gorge déployée, ses invités aussi, soulagés de ne pas être à ma place. Et dire que je n'aurai même pas goûté au vin gratos de la semaine. Maudit. Les murs se referment, Radio-Canada s'embrase et je me réveille.)

24 janvier 2007

Les nouveaux amis

Tout le monde sait que lorsque ça fait quelques années que vous êtes en couple, il faut continuellement renouveler le stock d’amis. Ce n’est pas nécessairement que les vieux, ceux que vous avez trouvés individuellement lors de l’ère pré-hypothèque ou les voisins du premier appart avec qui vous avez partagé vos derniers bidons d’eau de source lors de la crise du verglas ne font plus l’affaire. C’est que la vie change : il y a les défusions municipales, l’Islam, les chicanes de filles saoules et le Parti Conservateur, bref une multitude de raisons de devoir, périodiquement, courtiser de nouvelles victimes avec qui attendre en ligne au bar à pain du Pacini le samedi soir.

Lorsqu’en période de recrutement, tous les stratagèmes sont bons pour rencontrer de jeunes couples prometteurs : les événements cuisine-salon-cabanon chez Ikea, les partys de garderie, et, mon favori, les salles d’attente chez le pédiatre/dentiste/thérapeute de couple (des amis en santé, c’est important). C’est souvent mieux s’ils ont des enfants sensiblement du même âge que les vôtres ou bien beaucoup plus âgés avec un potentiel de gardiennage intéressant. Toutefois, c’est un problème si malgré des âges similaires, les enfants du couple ami sont du genre prédateur sexuel, se font pogner à voler de l’Oxygel à la pharmacie, effectuent leur troisième cure à la méthadone, sont abonnés à Sensass ou toute combinaison de ces facteurs.

Vous trouverez sûrement des embûches sur la route des nouvelles amitiés, mais les avantages sont non-négligeables : peut-être découvrirez-vous une âme sœur dans votre adoration de l’œuvre cinématographique des pectoraux de Patrick Huard (ne riez pas, ça se peut, oui monsieur), ou dénicherez-vous le Graal des amis tripants, un couple pas d’enfants avec une maison énorme à Magog et un condo luxueux à Pompano.

Comme dans tout projet de couple, la quête comporte quand même des risques : nul besoin de vous souligner qu’une invitation à vous deux pour un drink au chic Motel Canada veut probablement dire que vos nouvelles recrues espèrent échanger plus que des recettes de scampi…Et que même si vous êtes bien tannés de passer les samedis soir en tête à tête, un réseau de ventes pyramidales ne présente pas un potentiel intéressant à long terme (si vous ne savez pas pourquoi, envoyez-moi 20$ dans une enveloppe et vous ne serez pas déçu. Si vous ne l’envoyez pas, je n’ai pas le droit de vous dire ce qui va arriver, mais ça sera vraiment poche et pas l’fun. Promis.)

Avec tout ça, vous me demanderez ce que nous, petits banlieusards minables, pourront bien apporter à ces nouveaux amis fantastiques? C’est facile. On connaît beaucoup beaucoup de monde.

23 janvier 2007

Lettre à Justin

Mon cher Justin,

J'ai été bien déçue d'apprendre que les membres du parti Libéral d'Outremont ne voulaient pas de toi comme candidat aux prochaines élections. Remarque que je n'étais pas surprise, car il est évident que tu n'avais aucune chance de leur plaire: non seulement s'agit-il de baby boomers grincheux, mais en plus tu leur tapes sur les nerfs. Comme je t'aime bien et qu'entre Genxers frustrés il faut s'entraider, laisse-moi te dire franchement ce qui cloche et te proposer des solutions. Voici donc "Cinq choses plates que ton conseiller médiatique aurait dû te dire avant de téléphoner à la Presse":

1) Tu es trop beau. Rappelles-toi: il s'agit de gens qui ont besoin de plus en plus d'entretien ménager pour sauver les meubles. Avec ta chevelure opulente, tes dents étincelantes et ta peau lisse, tu les écoeures. Ma suggestion: engraisse de 25 livres et fais-toi faire une coupe Longueuil. Si Sophie rouspète, dis-lui que ce sont des sacrifices essentiels pour devenir un jour premier ministre.

2) Tu es trop jeune. Pour les mêmes raisons qu'en haut, ce n'est pas une bonne idée de constamment leur rappeler que tu n'as que 36 ans. C'est un bel âge, certes, plein de découvertes intéressantes et de promesses fabuleuses, mais ils n'en ont rien à cirer: leur maison est payée, les enfants sont enfin déménagés et tout d'un coup ils ont besoin de Viagra et surtout de Celebrex pour reproduire la scène de sexe sulfureux de Fatal Attraction. C'est entre autres pourquoi je te propose de te faire faire des mèches blanches et te faire pousser la barbe. Celle-ci n'est pas assez touffue? Une barbichette fera l'affaire, mais là encore assure-toi d'y retrouver le longs poils blancs.

3) Tu perles trop bien. Personne ne veut d'un nerd comme premier ministre. Je sais que ce n'est pas facile à entendre et crois-moi LadyW a déjà eu ce problème-là. Comment ai-je fait pour me débarrasser de cette fâcheuse habitude de bien prononcer et de ne pas sacrer tel qu'enseigné par DaddyW et les bonnes sœurs du couvent? Facile. Le visionnement de quelques épisodes de Loft Story jumelés à une cure intensive de Bougons m'ont beaucoup aidée, comme ils t'aideront sûrement. Je ne garantis pas que ta foi en la nature humaine survivra par exemple.

4) Tu es trop riche. C'est lefun que tu aies été capable de te permettre la maison de ton enfance à Outremont, mais comprends les autres GenXers se comptent très chanceux de pouvoir s'offrir l'équivalent du cabanon de leur enfance à St-Télésphore. Ainsi, je te suggère de te louer un demi sous-sol à Repentigny que tu pourras habiter en temps de campagne électorale et montrer avec fierté aux journalistes. Certains se louent des baise-en-ville, toi ça sera un guidoune-en-périphérie, c'est tout.

5) Tu es trop parfait. Honnêtement, es-tu obligé de respirer la santé et la joie de vivre? Un peu de vice n'a jamais fait de mal aux politiciens et ai-je besoin de te rappeler qu'Hitler était végétarien? En tout cas, moi je me trouverais un secret honteux, pis ça presse. Ton épouse l'a compris avec sa boulimie, Boisclair a déjà pris la coke au Parlement, Mulroney et le scandale des commandites ont épuisé le filon des pots-de-vins. D'après moi, si tu ne veux pas te lancer dans les pratiques sexuelles douteuses, il te reste peut-être l'alcool (et c'est vrai que ça pourrait aider avec le numéro 1) ou bien les crimes verts, genre ne pas trier son recyclage ou jeter ton vieux Commodore 64 aux vidanges au lieu de l'apporter à un organisme spécialisé. Je le sais que ce n'est pas trop croustillant mais tu es encore jeune et les idées de débauche créatives viennent souvent avec l'âge.

Enfin, un petit mot d'encouragement pour conclure. Ne laisse pas de vieux schnoks qui connaissaient bien ton père te farcir la tête de platitudes comme la nécessité de l'expérience, le leadership participatif, l'engagement social et tout ça. Les Américains ont élu George W. Bush deux fois, et ce n'est pas parce qu'ils aimaient sa plate-forme électorale. C'était parce qu'ils se trouvaient plus brillants que lui et que ça leur faisait un petit velours.

21 janvier 2007

L'espoir

L’autre jour j’étais au Starbucks près de chez à me commander un capuccino. Lorsque c’est venu le temps de payer, la fille au comptoir me remet une carte et m’avise que quelqu’un a payé mon café pour moi.

L’instant d’un soupir, une couple d’idées folles me traverse l’esprit : c’est le beau Rock du département des Finances qui a traversé le pont pour m’offrir un drink affriolant de caféine et lait… Ou bien Patrick Huard (qui soit dit en passant s’entraîne au même gym que moi et paraît drôlement bien même recouvert de swing…) victime d’un coup de foudre plus tôt au Maxi qui m’a suivie jusqu’ici pour m’arracher à ma vie de banlieusarde montérégienne (lui aussi habite la Rive-Sud, mais bon, c’est sûr que sa vie est plus palpitante que la mienne)… Puis, un autre soupir : je lève la tête et me rappelle que Mari Chéri m’accompagne dans cette excursion au Starbucks et même si Rock ou Patrick m’invitaient à les suivre au bout du monde, il resterait les questions délicates de ma monogamie heureuse et des deux êtres de lumière qui attendent leurs biscuits aux pépites de chocolat chez nous. De toute façon je suis due pour un dépoilage majeur chez l’esthéticienne et en plus ma silhouette porte encore les vestiges plantureux du congé de Noël. C’est vraiment pas le temps de me mettre à nu, figurativement ou littéralement. De toute évidence, Madame Bovary je ne suis pas.

Donc, je regarde la carte : une adresse de blogue, www.ventsdespoir.blogspot.com, que je me dépêche d’aller visiter en arrivant chez moi. Je vous épargne les détails, vous irez y jeter un coup d’œil, mais en gros il s’agit de trois personnes qui ont fondé ce qu’ils appellent une “église simple”, c’est-à-dire une mission chrétienne à l’extérieur de la religion traditionnelle. Ils ramassent des fonds de différentes manières qu’ils remettent à l’armée du Salut pour financer ses projets.

Ça m’a fait réfléchir un moment à l’espoir : l’espoir que Dieu existe toujours en nous, malgré Youtube et les images de pendaison de Saddam disponibles 24/7, malgré la grippe aviaire et malgré l’indifférence généralisée envers toute chose spirituelle. Car rendons-nous à l’évidence : la foi, l’espoir, l’amour de son prochain, ça ne pogne plus. On préfère se scandaliser devant le racisme confirmé des Québécois (découvert grâce à la sommité de la sociologie moderne qu’est le Journal de Montréal) et insister pour que le gouvernement lance une grande campagne de sensibilisation. Ça nous fait sentir mieux, surtout quand quelqu’un d’autre doit faire l’effort et sortir de l’argent de ses poches. Je sais pas si vous êtes comme moi, mais le gouvernement aurait beau lancer une très belle campagne brochure quatre couleurs et kits médias à l’appui pour me persuader d’aimer les Malgaches, il faudrait bien que j’en côtoie un ou deux pour mieux les connaître avant d’apprendre à les apprécier.

Donc, voici le message pas très subtil de ce blogue : le gouvernement peut informer et à la limite sensibiliser à une situation, une maladie, un danger, mais c’est tout. Changer des comportements et des attitudes, ça se fait au quotidien, à force d’huile de coude, de volonté, et, oui, d’espoir. L’espoir que nous possédons en nous ce qu’il faut pour véritablement changer notre monde, un geste à la fois.

20 janvier 2007

Rien du tout

Ceci est un chapitre sur rien du tout. Comme l'épisode de Seinfeld où les deux héros proposent une série télévisée à propos de quatre individus niaisant dans leur salon aux VP émerveillés de la prestigieuse chaîne NBC (je ne sais pas si mes lecteurs seront émerveillés mais c'est mon blogue, et si je veux vous décrire une scène palpitante où je vide le lave-vaisselle et que j'ai les cheveux sales, c'est mon choix. Vous n'avez qu'à passer au chapitre suivant où je serai sûrement plus divertissante. Enfin peut-être. Ça dépend si je prends goût à la rientude.)

Tout le monde le fait. Regardez Paris Hilton et Occupation double, les ondes sont saturées de jolis spécimens insignifiants sans talent particulier à part le port du bikini et un appétit insatiable pour l'imbécillité médiatisée. Pas que je serais réfractaire si on me proposait de passer un mois ou deux enfermée dans une grosse cabane de Lavaltrie à faire du tapis roulant et à jouer à la tag BBQ devant un demi-million de téléspectateurs pour gagner des voyages en chameau dans le désert. Je suis sûre que ça serait le fun, des vacances de la vraie vie. Je pourrais en profiter pour réaliser une étude anthropologique des habitudes d'accouplement des jeunes guerriers de la tribu québécoise (et des goûts de voyeurisme de leurs mononcles et matantes bedonnants devant leur TV) pour mon doctorat éventuel. Peut-être même que ne serais pas mise en danger la première semaine si je ne mangeais pas tous les Whippets et si je jetais mes vieux emballages de Whitestrips dans les vidanges. Peut-être. Les jeunes d'aujourd'hui sont si imprévisibles.

Je dois avouer que toute cette réalité me fait regretter de ne pas avoir enregistré tous les épisodes de Marisol quand j'avais la chance. Les dialogues nonos, les décors pastels en carton, le beau Comte joué avec brio par Luis de Cespedes, c'était le bon temps! Maintenant on a des massages faussement cochons, des ameublements d'une valeur de mille millions de dollars gracieuseté de Brault et Martineau, et un apprenti-électricien de Dolbeau qui n'a pas fini son secondaire IV. Où est la magie? Où est le rêve? Depuis quand on a arrêté de se forcer pour avoir l'air un tant soit peu intelligent ou culturé?

Coudon. On n'a plus les riens qu'on avait. Trois paragraphes sur rien pentoute. Je devrais envoyer mon cv à Blogue Académie. Je me demande s'il faudrait que je me fasse épiler le bikini?

19 janvier 2007

- 19°C, le matin

24 février 2004, 7h58: début de la tranche de vie

Maman-avec-cheveux-mouillés-en-bobettes-et soutien-gorge-et-maille-dans-les-bas-nylons: ''Minou, sweetness, serais-tu assez fin pour aller réchauffer l'auto? Il faut que je mette des pantalons, et on va rater le train… ''

Mari-Chéri-déjà-habillé-qui-s'admire-dans-le-miroir-de-l'entrée: ''Il faut pas oublier de rapporter le cache-cou à la gardienne, elle me l'a demandé hier.''

Maman-en-train-de-se-mettre-du-déodorant-en-courant: ''J'ai pas eu le temps de le laver et on l'a échappé dans la slush en sortant de l'auto. Tu feras semblant qu'on l'a encore oublié?''

Mari-Chéri-évaché-sur-le-sofa: ''Oui, mais tu sais comment j'hais ça lui mentir, c'est comme si elle savait quand je lui raconte des menteries…''

Maman-qui-garroche-trois-clémentines-et-un-yogourt-dans-sa-sacoche-en-vidant-le-lave-vaisselle: ''Fais comme si c'était moi quand t'es allé à l'enterrement de vie de garçon de ton frère et que je t'ai demandé si c'était du rouge à lèvres sur tes BVD. T'as failli pas te faire pogner cette fois-là…''

Mari-Chéri-qui-se-coupe-les-ongles-d'orteil: ''C'était pas pareil, on était au poste de police devant les enfants, je n'avais pas le choix…''

Maman-qui-mouche-le-nez-de-bébé-en-se-mettant-du-mascara-de-l'autre-main: ''Whatever, dis-lui la vérité d'abord. Mon ange, on est vraiment en retard, l'auto stp?''

(Mari Chéri sort en ronchonnant qu'il est toujours pogné avec les jobs sales dans cette famille-là.)

Maman-qui-court-après-bébé-avec-l'habit-de-neige-et-la-brosse-à-dents-Dora: ''Viens voir Maman, ma peanut, on va s'habiller en se brossant les gencives… Que c'est lefun!''

Bébé-tourbillon-de-bave-et-de-morve-qui-court-plus-vite-que-l'habit-de-neige-et-la-brosse-à-dents: ''Hihihihi! Atape bébé, maman…''

Maman-qui-pogne-bébé-et-qui-brosse-d'une-main-et-zippe-de-l'autre: ''Là maman, elle a pas le temps de niaiser. J'ai un comité de gestion ce matin pis ma présentation est pas finie, aide-moi un peu bébé…''

Bébé-tout-emmitouflé: ''Fais mal, maman!''

Maman-qui-ramasse-le-sac-à-couches-le-portable-les-sacs-à-lunch-et sa sacoche: ''Tu diras ça à Matante, mon amour. Envoye bébé, let's go!''

(Maman ouvre la porte, descend les escaliers et charge la minivan. Bébé reste en haut des escaliers en chignant.)

Maman-de-plus-en-plus-énervée: ''Bébé, viens-t'en… On est en retard! Si tu viens tout de suite, je t'apporte une surprise ce soir…''

(Bébé fait quelques pas et chiâle de plus belle.)

Maman-qui-rage: ''Veux-tu que je me fâche? Cétuça que tu veux?''

Mari-Chéri-assis-au-volant-de-l'auto-chaude: ''On se calme maman… Laisse bébé aller à son rythme…''

(Il commence à neiger doucement. Le quartier morne de banlieue se transforme en un décor hivernal féérique. Maman s'en crisse: elle monte les escaliers, s'empare de Bébé et l'assoit dans son siège d'auto. Bébé braille. )

Mari-Chéri-inquiet: ''C'est pas normal qu'il pleure comme ça… C'est comme s'il avait mal?''

Maman-en-train-d'essayer-d'attacher-la-ceinture: ''Ben non, viarge. Il sent que je suis énervée et les enfants c'est comme des petites éponges… ''

Mari-Chéri-horrifié: ''T'as oublié de mettre ses bottes d'hiver! Regarde, ses petits bas sont pleins de neige!''

24 février 2004, 8h13: fin de la tranche de vie

16 janvier 2007

J'aime Eminem

“Shake that ass, shake that ass for me…’’ Bon, pour le lyricisme on repassera. Si au moins je pouvais faire semblant que je ne comprends pas un traître mot d’anglais. Mais il est temps, temps de me libérer de ce secret douloureux qui menace mon couple, ma relation avec mes enfants et ma vie sociale déjà fragile.

J’aime Eminem. Je le trouve beau, j’aime sa musique et son personnage un peu dégueu et rustre qui me donne le goût de le materner, de lui prouver que toutes les femmes ne sont pas toutes des bitches et des ho. Si seulement je pouvais lui parler, lui faire à souper (un osso bucco bien aillé peut-être? Ou est-il du type steak-patate-blé d’inde?) et lui présenter ma petite sœur : elle est jolie, bien élevée et vient d’une bonne famille. En plus, elle a son propre appart et un char, donc pas besoin de s’inquiéter pour ses millions. Aussi, elle a plusieurs tattoos, une couple qu’on peut même voir en société. Enfin presque. Ça dépend quelle société j’imagine.

Ce qui est drôle, c’est que mon chum, le GARS, trouve mes goûts bien gênants. Déjà il m’a très gentiment demandé de ne rien dire lorsqu’on soupe avec nos amis banlieusards et que le sujet des rappers blancs misogynes et paranoïaques est soulevé, sous peine de me voir interdire l’accès à la télécommande à jamais. C’est à ce moment-là que j’ai compris l’étendue du gouffre qui me sépare de ceux que j’aime.

Même mon fils ado, qui n’est pas étranger au cool absurde, CD de Canadian Idol à l’appui, me trouve étrange. Lorsque ses amis viennent à la maison, il camoufle ma collection de CD favoris sous une pile de Diana Krall et d'Andréa Bocelli bien positionnés. Vous me demanderez ce que je fais avec ces CD de toute façon? C'est que je sais ce qu'on attend des mamans dans la trentaine avancée: sois plate et tais-toi.

Il me reste mon petit Simon, quatre ans. L'époque où je pouvais lui enseigner de mauvais mots en anglais en cachette et observer l'air ébahi et traumatisé des visiteurs lorsque le joli chérubin leur lâche un mot de quatre mots bien senti est presque révolue. Déjà, il se méfie lorsque je lui affirme que moufette est un mot terrible à proscrire et vérifie avec l'éducatrice à la pré-maternelle. Le métier de parent délinquant est bien ingrat parfois.

J'ai lu dernièrement que Eminem venait de se remarier avec sa première épouse et qu'il pensait sérieusement à prendre sa retraite pour passer plus de temps avec sa famille. Ça a l'air que lui aussi n'a plus besoin de moi.

15 janvier 2007

Thérapie

Ça faisait longtemps que mon entourage (bon, ok, ma mère) me suggérait d’aller voir un psychologue. « Ça va te faire du bien. » « Tu devrais te faire prescrire des pilules. » « C’est pas normal de manger une douzaine de Krispy Kreme toute seule. » (Ok, pour les pilules, elle avait raison.)

C’est juste que dans mon livre à moi, la thérapie, c’est pour Woody Allen et les faibles. Moi je suis forte, et j’ai un Mari Chéri qui peut bien écouter mes problèmes, et au pire aller, y’a rien qu’une petite bouteille d’Asti Spumante avec un roman de Jackie Collins ne peut pas régler. Je ne suis pas une femme compliquée.

Mais bon, dernièrement je sentais un vide. Une insatisfaction que même Krispy, Asti ou Jackie n’arrivaient pas à me faire passer. Une boule d’angoisse impossible à digérer (vous allez me dire que c’est les beignes, mais non, c’était pas le même jour). Donc, j’ai décidé d’y aller pour voir.

Le jour de ma première session, j’étais indécise : quel est la tenue de mise pour aller en thérapie? Tenue de ville grise et déprimée? Tutu rose et casque de moto fluo? Je choisis le tut…oups, non la tenue de ville quand même, et me dirige avec trépidation vers son bureau rue Sherbrooke.

La voix au téléphone m’avait semblée gentille, apaisante, et je ne suis pas surprise de voir que la dame à qui elle appartient est, elle aussi, d’apparence plutôt tranquille. Son bureau est assez ordinaire et je suis déçue de ne pas trouver un gros ottoman en cuir comme dans les films. Dans le coin, il semble y avoir un espèce de garde-robe, où je m’imagine qu’on retrouve un stock important de boîtes de kleenex, de même qu’un assortiment de housses pour le fauteuil pour quand les vrais névrosés épanchent leur âme meurtrie. Moi j’ai déjà décidé que :

1) Je ne lui parlerais jamais du rêve sexuel où je suis poursuivie par la tête de Guy A. Lepage montée sur un dildo géant plaqué or.
2) Je ne lui révélerais pas mon étrange obsession pour McMario et les mastermix de 9 heures.
3) Je ne lui avouerais pas ma passion malsaine pour toute chose Tupperware.

Bien sûr, je n’ai pas le choix de déballer tous ces faits troublants dans les dix premières minutes. C’est qu’elle est persuasive, ma psychologue. Ça débute avec un petit « Comment ça va? » innocent, elle passe à l’attaque avec un sournois « Vous pouvez vous asseoir là. » puis elle vous assène un coup mortel avec « On peut commencer tout de suite si vous voulez. » Ah, je suis sans défense devant tant de savoir-faire, d’habileté!

Au bout de quelques minutes, je sais maintenant à qui j’ai affaire, et je refuse de me laisser percer aussi facilement. Je suis une femme complexe, pleine de névroses insolites, oui monsieur, un véritable mystère de la psychologie moderne, et j’en veux pour mon 70$. Je m’invente ainsi un vol de sacoche manqué dans un stationnement de Loblaws, un passé de prostituée-héroïnomane membre d’une secte sataniste de St-Lambert, une ex-amante maintenant transexuée qui s’appelle Sonia/Roger, des enfants ignobles qui ont vendu un de mes reins à un Américain, un patron libidineux et cruel qui nous force à voler des cartouches d’imprimante qu’il vend sur le marché noir pour financer ses après-midis au casino… Après la première demi-heure, je vois qu’elle commence à transpirer, qu’elle tremble un peu. Après une heure, son oeil gauche a comme un tic nerveux. Moi je me sens beaucoup mieux, vraiment ressourcée, heureuse d’enfin pouvoir en parler à quelqu’un (ok, c’est pas vrai tout ça, mais n’avez-vous jamais entendu parler du pouvoir guérissant de la fantaisie?).

« Nous allons devoir conclure. » me dit-elle, se levant précipitamment pour ouvrir la porte.

« D’accord. Est-ce qu’on prend rendez-vous la semaine prochaine? »

« Euh, non, malheureusement, je ne pourrai pas poursuivre la thérapie avec vous. »

« Comment ça? Je croyais que ça allait si bien? »

« C’est pas ça. C’est que…que… » Elle fuit mon regard, examine attentivement le bout de ses souliers. Je suis complètement ahurie.

« Quoi? Qu’est ce qui pourrait justifier l’abandon de vos responsabilités professionnelles? Nous sommes dans une relation d’aide! Vous devez m’aider! »

« Non, je ne peux continuer à vous voir parce que… parce que… je traite aussi Sonia/Roger. »

14 janvier 2007

La supercherie

Je suis une mauvaise mère. Oui, absolument. J’aimerais me trouver des excuses, blâmer ma propre mère, l’iode dans l’eau de mon quartier ou même le système d’enseignement public québécois des années 70, mais il semblerait que ce soit entièrement de ma faute. Je m’explique.

Je venais d’accoucher de mon deuxième fils et ma belle-soeur hyper-organisée, celle qui a entièrement planifié sa grossesse dans Microsoft Project ( Sous-projet, « Conception », Chargé de sous-projet : couple, livrables : sperme, ovule, fertilisation, tâches : 1.1 création de l’environnement propice : télévision fermée (ou sur le mute), bières dans le frigo, collier de perles et bottes de cochonne, 1.2 Préliminaires amoureux : Visionnement de Bleu Nuit, fellation, cunnilingus 1.3 Pénétration : position optimale pour conception d’une femelle (*ingestion de noix et de jus de citron au préalable selon études de la clinique Mayo) 1.4 Éjaculation etc…) m’invite à une clinique d’allaitement au CLSC. Je suis emballée : enfin la chance d’enfiler à nouveau mes jeans de maternité (qui ne me faisaient plus), de rencontrer d’autres mamans, et d’échanger sur nos expériences de féminité comblée! En plus ça ne coûte rien!

Sauf que, seul hic, je n’allaite pas vraiment le petit Simon. Enfin, pas à temps plein. Enfin, le moins possible. Servir de cafétéria 24/7 ne m’allume pas, et Simon, quant à lui, semble préférer le biberon, et de loin. Je l’ai bien mis au sein quelques fois, mais dernièrement il a le don de me regarder avec indignation comme pour m’ordonner d’arrêter de me raconter des histoires et de lui passer la bouteille, bordel. M’enfin. C’est fou comme c’est expressif des nouveaux-nés quand on se sent coupable.

Donc, j’arrive au CLSC un peu inquiète : je ne sais pas à quoi m’attendre, j’ai peur qu’ils ne s’aperçoivent que j’ai gavé bébé au Similac avant de partir, et je viens de me rendre compte qu’il a dégobillé partout sur son pyjama neuf. Normalement, ce genre de chose ne me dérange pas (j’ai porté des traces de mes repas sur la bédaine durant toutes mes grossesses), mais on a pas la chance de faire une deuxième première impression, et j’ai vraiment besoin de me faire des amies.

À première vue, je n’ai pourtant rien à craindre : la clinique d’allaitement est un havre de douceur et de chaleur humaine, avec des dizaines de bambins accrochés au sein de leur maman ou se promenant gentiment en couche. Ce n’est toutefois pas vraiment un havre de paix, car un des tout-petits est manifestement enragé et tente de mordre sa pauvre mère presque en pleurs elle-même. Toutes les autres mères, moi incluse, font semblant de ne rien remarquer, secrètement convaincues que nos propres enfants ne se comporteraient jamais de la sorte avec nous.

Je trouve un coin et étale ma couverture sur les coussins par terre. Je sors des petits jouets pour Simon, et pour une minute ou deux, je suis le portrait même de la maman modèle. Puis, la mère d’un petit rouquin à côté de moi me sourit avec gêne :

« Vous voyez le hochet là que votre bébé a dans la bouche? »

« Oui. Il est joli non? C’est un cadeau de ma mère. »

« Ben, c’est parce qu’il y avait un reportage sur Télé-Québec avant-hier, et ils ont dû les retirer du marché parce qu’un bébé aux États-Unis a réussi à le briser avec ses dents et à avaler une des boules à l’intérieur. Il en est presque mort. »

Paniquée, je retire un peu trop vite le jouet visqueux des mains et mâchoires de Simon. Tout d’un coup, bébé éclate en sanglots et toute la clinique se tourne vers nous. L’infirmière responsable (une chataîne genre mère Nature avec un chandail fait de laine de mouton équitable) vient vers nous et me suggère de le mettre au sein pour le calmer. Maudit, je suis faite.

Tant bien que mal, je détache mon soutien-gorge noir affriolant en dentelle (définitivement pas conçu pour l’allaitement) et tente de pousser mon mamelon dans la bouche de Simon. Monsieur n’est vraiment pas impressionné et s’étouffe avec la chair blanche. Il me repousse de ses petits poings et hurle son déplaisir. L’infirmière, inquiète, me demande si ce genre de situation arrive souvent, s’il boit bien d’habitude, si c’est du vomi sur le pyjama. Elle m’explique que les bébés allaités au sein régurgitent rarement, et que ça pourrait être un signe qu’il est malade.

Honteuse, je n’ai qu’une pensée : sortir de là. Je m’enfouis les totons dans la dentelle noire, attache le soutien-gorge tout croche et empile tous les effets de Simon pêle-mêle dans le sac à couche. Je ramasse le bébé d’un bras, le sac de l’autre et cours pratiquement vers la porte, où je rencontre ma belle-soeur avec son chérubin dans un sac en bandoullière.

« Où vas-tu? On vient d’arriver! »

« Merci, mais j’ai oublié de me laver les cheveux chez nous. On se rappelle. »

Pour les amies, je vais essayer les réunions de Weight Watchers. Au moins, j'aurai pas besoin de faire semblant que je suis grosse.

13 janvier 2007

La MTC

Début de la tranche de vie : 28 juillet 2002, 8h54

Dragon-féroce-a.k.a.-Doris-secrétaire-pas-fine-de-l’obstétricienne : Allo?

Maman-enceinte-de-17-mois (en tout cas on dirait) : Bonjour, est-ce que je pourrais parler à Dr. Lebrun?

DFADSPFO : Elle est avec une patiente. Est-ce que je peux vous aider?

MED17M : Hum, ben, peut-être… J’aimerais mieux parler au médecin…

DFADSPFO : LadyW, est-ce que c’t’encore encore vous? Je vous l’ai dit que regarder Les Sopranos à huit mois et demie de grossesse n’allait pas provoquer des comportements asociaux chez votre enfant… pis que manger quatre pointes de cheesecake du Costco pour déjeuner allait pas aider avec votre diabète…

MED17M (au bord des larmes): Non, c’est pas ça… C’est ben pire cette fois… J’ai tellement honte…

DFADSPFO : C’est correct ma petite maman, j’en ai vu d’autres. Quécékia? Vous rentrez plus dans vos bobettes de maternité? Vous n’avez pas vu vos pieds depuis février? Il vous pousse du gros poil noir dans les oreilles?

MED17M (mécontente) : Comment vous savez ça, vous? Est-ce que c’est Mari Chéri qui vous l’a dit? Maudit crétin, vous saurez que lui il en a plein dans le nez… qui dépasse… c’est dégueu, mais moi je me la ferme parce que c’est l’homme au global que j’aime… Heureusement d’ailleurs… sinon, je vous jure…

DFADSPFO (interrompant) : ben oui, ben oui, c’est juste ça, d’abord? Pas grave. Avec tous les cheveux que vous allez perdre dans une couple de mois, vous allez être contente d’avoir du volume dans le secteur, même si c’est dans les oreilles! Ha ha ha!

MED17M (pas trop amusée) : justement, c’est mes cheveux le problème…(en chuchotant) Je pense que j’ai pogné une MTC…

DFADSPFO : Une quoi?

MED17M : Une MTC… Une maladie transmise capillairement…

DFADSPFO : C’est quoi ça?

MED17M (qui s’énerve): Ben là, je peux pas entrer dans les détails, je suis au bureau et ils m’ont enlevé ma porte depuis que je n’arrivais plus à passer dans le cadre avec les pentures pis toute… mais en gros j’ai une maladie honteuse des cheveux et j’exige de parler à Dr. Lebrun!

DFADSPFO : Wo les moteurs. On se calme... Il faut que je prenne le plus de renseignements possible pour qu’on puisse vos aider. Quels sont vos symptômes?

MED17M (qui s’énerve un peu plus) : Ça pique, bon.

DFADSPFO : C’est tout? Vous voulez parler à Dr.Lebrun parce que la tête vous pique?

MED17M (qui s’énerve un peu plus) : Y’a d’autre chose mais je veux pas en parler là là.

DFADSPFO : Si c’est juste ça… je regrette mais je ne vois pas pourquoi ça ne pourrait attendre à votre prochain ren…

MED17M (qui hurle maintenant, hors-d’elle) : J’ai des POUX, viarge! Des petites bibittes qui me courent partout dans la tête, que mon plus vieux a rapporté du camp de jour. J’en ai dans les yeux, les oreilles, le nez, pis même la noune me pique astheure. ESTCEQUEJEPOURRAISPARLERÀDRLEBRUNMAINTENANT?

Fin de la tranche de vie : 28 juillet 2002, 8h58

12 janvier 2007

Le sexe original tout nu

Lorsque mon fils aîné avait quatre ans, je l’ai entendu affirmer à mon beau-père qu’il avait entendu son père et moi faire le sexe original tout nu. Lorsque je lui en ai reparlé plus tard, loin des oreilles amusées de ses grands-parents, il m’a affirmé que tard un soir il avait été réveillé par des grognements animaux (son père, sûrement) et des petits soupirs coquets (moi, bien sûr), et qu’il avait descendu les escaliers pour mieux apercevoir ses deux parents en plein coït (position levrette) dans la salle familiale.

Ouin. J’étais partagée entre plusieurs émotions :

a) soulagée parce qu’au moins il n’avait pas choisi un soir où nous avions choisi d’agrémenter nos ébats du visionnement du chef-d’oeuvre de porno « Chicks and no dicks »,
b) inquiète de l’impact que cette expérience aurait sur sa vie sexuelle future (Serais-je Mamie avant l’âge de 40 ans? Devrais-je commencer à épargner pour les frais d’avocat quand il se ferait pogner à se masturber au Biodôme devant la cage des gorilles?)
c) intriguée par l’étymologie de l’expression « sexe original tout nu » (au lieu de quoi au juste? « Sexe insignifiant partiellement vêtu »? « Jeu de cartes cliché tout habillé? »)
d) tentée de me prévaloir du privilège de l’autorité parentale et de rapidement orienter la conversation vers des sujets plus familiers (« Scalper des Barbies n’est pas un jeu acceptable. » « As-tu pensé à rétracter ton prépuce dans le bain hier soir? »).

En bout de ligne, j’ai choisi (d) et ça me convient parfaitement. De toute façon, c’est à son père de s’occuper de ces affaires-là.