26 mars 2007

The C-Word

Début de la tranche de vie: le 13 septembre 2004, 18h51, Sheraton de Boston

J'ouvre la porte à grand peine à l'aide de la petite carte magnétique car j'ai les mains pleines de sacs. Oui, ben les adeptes de la simplicité volontaire ne seraient pas épatés: quatre paires de souliers, treize bobettes cathédrale en stretch et 93$ US de makeup Sephora. Être une déesse dodue au Royaume des dodues comporte ses avantages – et ses périls pour la Visa.

J'enfile rapidement mon pyjama et ouvre la télé. Hum, Entertainment Tonight tire à sa fin, trop tôt pour Survivor. Je m'égare vers les canaux payants: j'ai le choix entre Anacondas, Dirty Dancing 2 ou Eurotrip. Pas fort. Je m'apprête à fermer la télé quand j'aperçois la bande annonce pour The L-Word, avec Jennifer Beals.

Moi Jennifer Beals, je l'adore. Depuis ses années Flashdance et son petit coton ouaté déchiré qui lui dénudait savamment l'épaule et ses numéros de danse avec la chaise qui ont longtemps alimenté mon répertoire à la discothèque 14-18 (en l'absence de chaise, j'avais adapté les moves pour un cadre de porte ou un siège de toilette), elle est depuis toujours pour moi l'incarnation même du sexe et du nec plus ultra en matière de métiers non-traditionnels. Bref, elle me plaît. Sans même lire la description, j'achète l'émission.

Pendant les publicités, je me commande une assiette de nachos au poulet avec une bière, calculant mentalement combien de consommations d'alcool se retrouveront sur mon compte de dépenses. 21 à date. Que voulez-vous: les conférences plates sur l'avenir des avantages fiscaux, ça me donne soif, très soif. Je ne suis d'ailleurs pas la seule, si je me fie à la délégation de consultants du Maryland avec qui j'ai foxé la dernière présentation sur ERISA au bar karaoké de l'hôtel. C'est moi qui vous le dis, des Bob poilus de Baltimore saouls, ça peut chanter "My heart will go on" avec beaucoup d'émotion. Tout comme les déesses dodues copieusement imbibées de Kir Royal peuvent interpréter Thriller et l'accompagner d'un moonwalk impec (avant de s'enfarger dans leur châle de bohémienne de Greenfield Park). Entécas.

Je m'installe sur le lit et l'émission commence. Ah, ok. Jennifer joue une lesbienne, pis elle a une blonde, Tina, mais elles ont des problèmes de communication. Jennifer est comme l'homme dans le couple (mais sans moustache ou amour malsain des ailes de poulet), pis Tina se prépare à tomber enceinte par insémination artificielle. Elles se chicanent quand vient le temps de choisir le donneur de sperme mais elles se réconcilient. Pendant, comme, 18 minutes. Avec la langue et d'autres parties intimes de leur anatomie féminine.

Au bout de 13 minutes, je commence à me demander sérieusement si je me suis trompée de canal. En plus il fait chaud, en tout cas, moi je trouve. Voyons, LadyW, t'es cool, que je me dis. T'as déjà vu ça des filles qui s'embrassent. T'es allée au cégep, et au Thunderdôme aussi.

Ça cogne à la porte. Jennifer et Tina ont l'air de s'être calmées, alors j'ouvre en espérant que le service aux chambres emploie des aveugles. Le serveur rentre dans la chambre et dépose le plateau sur la petite table. Exactement au même moment, la télé émet un miaulement d'extase qui fait trembler (en tout cas, on dirait) les murs de la chambre. Le serveur et moi nous retournons en même temps pour admirer Jennifer en train de frencher Tina à pleine bouche, la main enfouie profondément dans sa culotte. Avec un gémissement violent, Tina est arrivée à destination ça a l'air, et moi je suis de la couleur d'une pancarte de collecte de sang.

Serveur: «Ah, yes, The L-Word. Very good program, have you watched it before?»

LadyW, avec le désespoir de la honte: «NO! Oh God no. We don't have it in Canada!»

Serveur, l'air navré: «Pity. This is only the first season. By the third, it gets REALLY hot!»

LadyW, intéressée malgré elle: «You mean, hotter than this?»

Serveur, avec un petit sourire: «Oh yes. Trust me.»

Il me fait signer l'addition et sort discrètement, non sans m'avoir fait un clin d'œil coquin. Yé. Je l'imagine déjà dans les catacombes du Sheraton en train de raconter à ses petits amis de la buanderie que la petite madame à l'accent étrange de la 1016 est en fait une grosse cochonne dépravée qui boit toute seule dans sa chambre en écoutant du girl-on-girl porn entre deux spectacles de karaoké lascif au bar de l'hôtel.

Bref une autre journée ordinaire dans la vie de la déesse dodue.

Fin de la tranche de vie: le 13 septembre 2004, 19h38, Sheraton de Boston

10 commentaires:

Cath a dit...

MDR (en fait, je braille!)
C'est tellement, mais tellement le genre d'histoire qui peut m'arriver!

Troooooop comique!

zazou a dit...

Super drôle! J'ai pu voir quelques épisodes lorsqu'ils ont été diffusés l'an dernier sur un poste de ma télé non cablée (le 43 de Toronto je crois). Tous les épisodes ne sont pas aussi sensuels. EN fait, c'est une super émission. J'espère que cela ne vous a pas trop traumatisé!!

Anonyme a dit...

hahahahaha
j'imagine la scène! Digne d'un film!

Anonyme a dit...

The L word (Elles en français) est maintenant diffusé sur ArTV (à moins que ce soit Séries+ ???).

Bref, c'est vrai que ça devient "hotter"! Avez-vous récidivé?

J'ajoute qu'il ne faut pas être embarrassé, quand on est une déesse, de ce qu'on écoute!!!

Anonyme a dit...

En fait, je suis devenue une grande fan du L-Word depuis, et j'ai loué toute la série en DVD, incluant la très hot 3ième saison ; )

Ceci dit, je suis un peu contente que ça passe à 22h00 quand mon ado et Mari Chéri sont couchés... Alors, j'ai Jennifer et Tina toutes à moi... Not that there's anything wrong with that!

Grande-Dame a dit...

Merci de contribuer à la dilatation de ma rate ce matin chère exquise déesse! :-D

Anonyme a dit...

LOLLLL
J'me sens comme mal à l'aise d'écouter the L-Word...non..voyeuse!...
Merci du dilatage de rate!!

Anonyme a dit...

Chère Déesse,

Votre histoire m’a bien fait rire. Ça m’a rappelé un événement qui s’est passée il y a quelques mois, où j’ai moi aussi eu peur de passer pour une grosse cochonne dépravée…

Je travaille à la maison, et, congé pédagogique oblige, fiston joue au Nin dans le sous-sol avec un ami pendant que je bosse. Ce jour là, j’ai une grande quantité de données à entrer sur mon site. J’utilise un système ultrasophistiqué, mais comme de raison, ça ne fonctionne pas toujours assez vite à mon goût. Avant de commencer à cogner des clous, j'attrape le dvd de "Six pieds sous terre", saison 3, épisodes 3-4-5, loué il y a 7 jours, que je n'ai pas encore eu le temps de regarder, et je l'insère dans le vieux iMac qui traîne à côté de mon bureau, histoire que l'après-midi passé à entrer des données sois moins plate. Je l’écoute d'une oreille distraite en travaillant.

Au début du 2e épisode, l’écran et le son commencent à avoir le hoquet pendant une scène ou l'embaumeur macho « Diaz » regarde sur sa table de travail un homme gai qui est mort du Sida, et dont le pénis est affublé d'un énorme « piercing » sur le gland, du genre de celui qu'on retrouve sur les nez de taureaux... (Il y a de ces moments de télé parfois...) l'image est au beau fixe; le disque ne répond plus. Je pèse sur Stop, mais rien à faire, la seule chose qui bouge à l'écran c'est le sablier rond multicolore du iMac (non mais j’y pense : multicolore comme dans "drapeau de la fierté gaie"; est-ce que mon vieux mac essaye de me passer un message?) Au même moment, j'entends mon fils monter l'escalier du sous-sol en disant à son ami "vient, je vais te le montrer sur le mac! Tu vas voir..." arghh!

Tout à coup, j’ai une vision d'horreur : le petit ami, néo-québécois d'origine Koweitienne, dis à sa maman: "La maman de mon ami travaille à la maison, elle regarde des films avec des pénis percés pendant la journée!" Je pèse sur tous les pitons, mais rien ne fonctionne. Je prends la première chose que je vois, en l'occurrence une boîte de kleenex, et je la plaque sur l'écran, juste au moment ou fiston entre dans le bureau.

"Sors d'ici tout de suite", dis-je à mon fils, qui vient de comprendre qu'il y a quelque chose d'illicite à l'écran. "C'est quoi? C'est quoi? Je veux voir!" Je fini par trouver le piton pour éteindre "physiquement" le mac, piton bien caché à l'arrière de l'ordi, design oblige...

Ouf! La catastrophe est évitée. Je trouve qu'à huit ans, mon fils connaît déjà bien assez de choses côté "en bas de la ceinture" pour son âge. Et le connaissant, j’en aurais entendu parler pendant des mois (Maman, te souviens tu quand…).

Anyway, de retour à mes données... Vive la technologie!

Anonyme a dit...

Moi aussi j'aurais été rouge collecte de sang loll J'aurais fermé la télé avant d'ouvrir la porte. J'aurais pas prit de chance lol

Anonyme a dit...

Mon chum adooooore the "L Word". Et moi, je suis immensément soulagée de ne pas être avec une autre fille. Je ne sais pas si j'aurais pu endurer d'autres spm que les miens.